OGAWA Yoko - Les lectures des otages

Dans un pays éloigné du Japon, sept touristes japonais accompagnés de leur guide sont pris en otages par des rebelles et finissent par mourir lors d'un assaut de tentative de libération. D'eux, il ne reste que quelques extraits à peine audibles sur la bande magnétique des écoutes qui ont pu être enregistrées à l'aide d'un micro espion placé dans un kit de secours échappé à la vigilance des geôliers, ainsi que des fragments d'écriture retrouvés dans les ruines de la cabane. Chaque histoire reconstituée est ainsi racontée plusieurs mois après le drame, au cours d'une émission radiophonique en leur mémoire.

Dans l’ancienne cabane de chasseur il n’y avait rien méritant le nom d’objet laissé par les défunts: les familles trouvèrent seulement éparpillés sur le sol des morceaux de phrases inscrites sur des éclats de bois. Les mots qui restaient sur les planches brûlées et noircies, discontinus, menaçant de disparaître d’un instant à l’autre, étaient probablement les traces d’écriture d’un otage. Bientôt, sur toutes sortes de débris provenant d’étagères, fonds de tiroir, cadres de fenêtre ou pieds de table, on découvrit celle des huit otages. Pour écrire, il semble qu’ils avaient utilisé des instruments tels que des aiguilles de nécessaire à couture ou des épingles à cheveux. Mais il ne restait que très peu de fragments d’écriture, si bien que l’on ne comprenait pas très bien le sens ni la raison de ce qui avait été écrit. (p.10)
J'achève à l'instant le dernier livre traduit de ma chère Yoko Ogawa. J'y ai retrouvé la délicatesse et le survol habituel qui fait de ses récits des sortes de fragments de vie. Des récits que j'ai perçu inégaux au cours de la lecture, certaines histoires étant plus intéressantes que les autres.
Au départ quatre foulées, au milieu huit, et après le lancement sept jusqu'à la fin. Ses jambes continuaient à marquer correctement ce nombre de pas. Que les rayons du soleil se renforcent ou que change la direction du vent, rien n'entrait en considération. 4,8,7. 4,8,7. 4,8,7. Cette répétition interprétait une mélodie sur la terre. (p.127)
Il s'agit de 9 nouvelles (qui suivent le préambule expliquant les circonstances du drame). Chacun des protagonistes raconte aux autres un souvenir particulier qui est toujours resté vivace. Ce souvenir évoqué est ensuite transcrit sur tout ce qu'ils peuvent trouver dans la cabane où ils sont retenus en otages, mais également écouté par des gens à l'extérieur de la cabane.

Le dernier récit fusionne tous les autres, tout comme les otages sont retrouvés tous ensemble :
Les corps des huit otages serrés l’un contre l’autre ne s’étaient pas désolidarisés dans l’explosion, ils avaient manifestement fondu ensemble, ne formant qu’un seul bloc. (p.10)
c'est l'impression qui me reste après la lecture. Le dernier récit expose l'enfance, la grand-mère, ... et il sert de "liant", de "filtre", pour ce consommé que nous a préparé l'auteur ; cette sorte de mets qui est au final bien plus complexe que ce que l'on peut percevoir au premier coup d'oeil. Un récit à plusieurs voix mais une seule tonalité : la vie n'est rien sans la mémoire et la solidarité.

Retrouver une critique plus complète sur mon site consacré aux oeuvres de Yôko Ogawa.

titre original : Hitojichi no Rôdokukai (2011)
183 pages édition française
récits traduits du japonais par Martin VERGNE
illustrations du billet par Sonia Roy

Commentaires

  1. Hum... je ne sais pas si ce livre est pour moi. J'aime beaucoup la couverture, mais la littérature asiatique et moi, ça fait deux en général... Je vais laisser mijoter un peu...

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  2. je comprends, le livre est déroutant de par sa structure même : des nouvelles toutes simples qui n'ont d'intérêt que mises ensemble où elles forment un tout. Ogawa n'est pas un auteur facile malgré son style qui n'a rien de particulier mais qui est pour moi, un style "juste", un peu comme pour les haïku : du récit ne reste que l'essentiel, cela peut paraître frustrant par instant.

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