Adèle Hugo ses écrits son histoire - Laura EL MAKKI


A partir du journal (ses écrits) que commence à tenir Adèle Hugo durant l'exil choisi par son père en 1851 (il avait 49 ans), l'auteur transcrit avec brio la vie de la famille et en particulier celle d'Adèle sa seconde fille (21 ans). On suit alors la famille qui se réfugie sur l'île de Jersey après avoir tout vendu, notamment ce qu'ils avaient dans leur appartement de la place Royale (aujourd'hui place des Vosges). Après Jersey, ce sera Guernesey et la maison Hauteville House que Victor Hugo entreprend de meubler soigneusement durant des années lorsqu'il commence à gagner de l'argent de ses publications.

Mais Adèle tient également un journal pour elle-même, sur des feuilles écrites en secret, elle s'exprime de manière lyrique, poétique, voire prophétique. Retrouvées partiellement bien des années après sa mort, rachetées, rassemblées, triées, transcrites et aujourd'hui conservées à la Maison de Victor Hugo, ces nouveaux témoignages permettent à l'auteur de combler d'autres périodes de sa vie (son histoire).

Mes souvenirs remontent à bien loin ou à bien près comme on voudra ; néanmoins je me souviens parfaitement encore de ma toute petite enfance. J'avais deux ans, dans ma très jeune imagination, je vois mon père me taquinant en me chatouillant. Des promenades qu'on essayait de me faire aux Roches. (p.40)

Un livre aperçu dans l'étagère des nouveautés de ma médiathèque, j'ai été attirée par le titre, puis la qualité du livre. Après la jolie préface d'Isabelle Adjani qui a incarné Adèle dans le film de François Truffaut "Adèle H." vu à sa sortie et qui m'avait fort impressionnée. J'avoue avoir eu besoin d'un rappel hors du livre car je ne savais pas pourquoi Victor Hugo s'était exilé : il était alors député et s'était vivement opposé au fait que Louis Napoléon Bonaparte se soit fait élire pour un nouveau mandat(*) par un coup d'état ; il était désormais proscrit et obligé de quitter la France.

(*) La Constitution de 1848 interdisait au Président de la République de se représenter à un second mandat.

Au début de l'exil, Adèle se comporte normalement, elle s'occupe avec la tenue du journal familial. J'ai vraiment trouvé que les autres membres exagèrent, l'empêchant de manger et de dormir pour être la scribe à l'instant "t". Une famille très bizarre ! J'ai peu aimé les passages des "tables qui tournent", un peu trop envahissantes dans le livre, et elles n'apportent pas grand chose au récit en dehors du fait que c'est une preuve toute la famille avait vraiment "un problème" ou s'ennuyait ferme dans son exil : parler avec les esprits, croire que des fantômes rodaient autour de leur maison ("la dame blanche" à Jersey).

On apprend qu'Adèle s'amourache d'un anglais mais l'union ne se réalise pas malgré une promesse de mariage signée par les deux protagonistes. Adèle trouvera un moyen de gagner son indépendance car elle refuse le mariage conventionnel mais elle ne peut subvenir à ses besoins : ses parents la financent avant de la faire rapatrier et l'interner dans un hôpital psychiatrique. C'est très émouvant sa fin de vie, elle meurt après ses frères et parents à l'âge de 84 ans, après être resté près de 40 ans dans une maison de soin.

Le livre est organisé de manière chronologique, et copieusement illustré, les photos sont très intéressantes mais les facsimilés des lettres sont malheureusement illisibles.
Le style est très agréable, l'auteur nous fait part de ses découvertes entre les extraits pertinents permettant le récit de son histoire tragique. Une très belle lecture. 

édité en février 2025


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