Clara Militch - Ivan TOURGUENIEV



1878 à Moscou. Jacques Aratov "Iacha", un jeune homme de 25 ans vit pratiquement reclus avec sa tante "Platocha" au milieu de ses études et livres, atteint par un défaut d'estime de soi. Lorsque son seul camarade l'invite à assister à une soirée, il rencontre Clara, une jeune femme qui l'impressionne autant qu'elle le met mal à l'aise. Acceptant de venir à un rendez-vous qu'elle lui donne, il s'enfuit, refusant de comprendre que la jeune femme éprouve un tendre sentiment pour lui. Peu après il apprend le suicide de Clara. Désormais hanté par son souvenir il entreprend d'en savoir plus sur celle qui lui refuse le repos de l'esprit  et entre en possession de son journal intime. 

Je n'avais jamais lu aucun livre de cet auteur, aussi lorsque j'ai vu ce petit livre posé sur une fenêtre près d'une boite à lire pleine à ras bord, je n'ai pas hésité et je l'ai emporté, la pluie menaçait de tomber.

L'histoire en elle-même n'est pas exceptionnelle : la nouvelle est trop courte pour que l'on s'attache à ses deux amoureux décalés très peu sympathiques au demeurant : lui, un garçon gâté et méfiant envers le sexe opposé, elle, une jeune émancipée énigmatique, incapable de se faire comprendre. L'aspect fantastique survient vers la fin lorsque Aratov a des visions, ou peut-être pas, de cette femme qui le hante et envers laquelle il se découvre un sentiment amoureux fatal puisqu'il se laisse mourir.

Le style est classique, assez froid, et sans humour : sans doute parce que le point de vue est celui d'un narrateur extradiégétique qui observe les évènements comme le ferait un scientifique dans un laboratoire, sans passion. L'auteur a écrit cette histoire l'année de sa mort, ce qui explique peut-être cette histoire pour le moins morbide.

Je suis malgré tout très satisfaite de ma lecture qui m'a permis de faire des recherches sur l'auteur et j'ai envie de visiter sa datcha proche de Paris quand elle rouvrira.

édité en 1883

Platocha elle-même remarqua chez Iacha, je ne dirais pas un changement d'humeur-car il ne s'en produisit aucun à proprement parler-, mais un je-ne-sais-quoi qui clochait, dans son regard, dans ses propos. Elle l'interrogea prudemment sur la matinée littéraire à laquelle il avait assisté ; après avoir bien chuchoté, soupiré, observé son neveu par devant, de côté, par-derrière, elle s'exclama tout à coup en frappant sur ses cuisses :

"Allons, Iacha, je vois ce qu'il en est ! 

-De quoi parlez-vous ? demanda Aratov.

-Sûrement tu as rencontré à cette matinée une de ces femmes à robe trainante...(p.41)

 

Illustration d'entrée de billet : Lilya Corneli "Blanche neige"

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