Blackwater, tome 5 : La fortune - Michael McDowell



Perdido en 1946. Frances épouse Billy Bronze, le jeune homme devenu indispensable aux Caskey autant que ce dernier ne peut imaginer sa vie sans eux. Très doué en gestion comptable, il prend en charge tout ce qui a trait aux finances de la scierie et également celles de chaque membre de la famille : il fait des miracles en mettant tout à plat, permettant ainsi à chacun de connaitre sa véritable fortune. L'achat de terrains, a priori sans valeur car marécageux et difficilement atteignables, va se révéler profitable car ils renferment du pétrole, ainsi que l'avait prédit la mystérieuse Elinor. Frances tombe enceinte et accouche de deux filles une humaine et une "aquatique" qu'il faut immédiatement remettre à l'eau, où là seule elle peut survivre se repaissant de poisson-chat ou de petit garçon téméraire qui s'aventure dans la rivière au jour de l'an. La famille s'agrandit au retour du fils de Queenie qu'elle croyait mort à la guerre et qui devient l'homme de confiance des Caskey. Sous la houlette de ­Miriam, non seulement la scierie est plus que jamais la pierre angulaire de la fortune de Perdido, mais son acharnement à développer les forages pétroliers accroit encore les richesses de tous, à la grande satisfaction d'Elinor qui voit tous ses vœux s'exhausser ; seule ombre au tableau : Elinor doit accepter la disparition officielle de Frances qui, à force de se baigner longuement chaque jour dans la rivière, se transforme mentalement et physiquement en monstre aquatique : il ne lui reste plus qu'à rejoindre son autre fille au fond des eaux rouges de la Perdido et de disparaître en tant qu'humaine.

 


Un cinquième tome peut-être un peu plus sombre avec un accouchement qui ne se fera pas sans douleur spirituelle pour une mère obligée d'abandonner l'une de ses jumelles à la Perdido. Nous lecteur, on peut comprendre à quel point cela peut-être ardu cette coupure maternelle. L'auteur a une incroyable façon de donner aux monstres l'autorisation d'exister dans leur véritable nature sans jugement.

Moi, je ne la trouve pas laide du tout, bien au contraire ! ajouta-t-elle en glissant affectueusement un doigt dans la bouche sans lèvres du nouveau-né et jouant avec sa langue noire et gonflée. Bien au contraire !
- Mais qui va s'occuper d'elle ?
Elinor prit l'enfant et se débarrassa des langes dans lesquels elle avait été emmaillotée.
"Il y en a d'autres là-dessous ? insista Frances. Quelqu'un qui va s'assurer qu'elle mange à sa faim ?" (p.124)

Le titre est on ne peut plus clair et réaliste tant les chapitres se suivent et martèlent comme les machines de forages des puits de pétrole, toutes les étapes qui feront des Caskey de grands propriétaires terriens richissimes. Lors de la lecture, je ne pouvais pas m'empêcher de faire le parallèle avec son roman précédent - écrit en 1980 - "Les aiguilles d'or", dans lequel l'auteur avait pris le parti des scélérats qui s'en sortent au détriment de personnages seulement coupables d'être nés riches.

édité en 1983

Ses puissantes jambes grises glissèrent sur les draps avec un bruit mouillé. A présent qu'ils n'étaient plus captifs de lourdes couvertures, elle étira ses pieds palmés et les fit gigoter. Puis elle se tourna légèrement, et sa puissante queue grise glissa sur le côté du lit pour pendre vers le sol. (p.218)

origine inconnue (pinterest)



  

Illustration d'entrée de billet : Vasilisa Romanenko

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