Madame Mohr a disparu - Maryla SZYMICZKOWA


L'histoire se déroule à Cracovie à la fin du 19è siècle. Zofia Turbotyńska, l'épouse pleine de ressources d'un professeur d'université décide d'organiser une vente de charité et sollicite la mère supérieure de la maison Helcel afin que les résidents préparent des lots qui seront vendus au profits d'enfants malades. La maison Helcel est une sorte de maison de repos / retraite tenue par des sœurs où les vieillards les plus riches participent à l'entretien des plus démunis. Un jour, madame Mohr disparait inexplicablement et Zofia, adepte des romans policiers suggère de fouiller également le grenier où la pauvre femme est retrouvée morte. Bientôt, une autre résidente est assassinée et alors Zofia, sous couvert de la préparation de son œuvre caritative, va finir par débusquer le véritable investigateur d'une ancienne vengeance au cours de multiples allées et venues dans la maison Helcel, aidée par l'une des sœurs de la maison ainsi que de sa cuisinière.


Encore une pépite dénichée au hasard des rayons de la médiathèque.

J'ai un peu hésité en lisant que l'auteur est en fait deux hommes : Jacek Dehnel et Piotr Tarczyński qui ont choisi le pseudo féminin Maryla Szymiczakow, car j'ai été souvent déçue des livres écrits à "quatre mains" (si je peux dire). J'ai bien fait de me laisser tenter après avoir lu les premières pages j'ai voulu donner sa chance à ce roman et j'ai été bien inspirée car j'ai passé un très bon moment de lecture avec cette héroïne originale, qui tente de se faire-valoir dans la bonne société mais qui en même temps a des vues humanistes. Il y a de toute façon beaucoup d'humour et de dérision dans la description de la plupart des personnages.
La narration est vivante, organisée en chapitres résumés en quelques lignes au tout début. On découvre la vie fort mouvementée d'une femme au foyer qui, n'ayant pas eu la chance d'avoir un enfant (ses dires), cherche à s'affirmer par elle-même, d'abord en arborant dès qu'elle le peut la fierté d'être l'épouse d'un professeur d'université, puis en s'arrogeant le rôle d'une détective (à son compte) pour faire éclater la vérité car elle a un bon coeur même si elle peut paraitre superficielle. De plus elle ne se démonte nullement même quand elle se fait rabrouer, elle réfléchit pour rebondir et trouver un moyen d'obtenir satisfaction.

J'ai trouvé cette nouvelle enquêtrice tellement intéressante que j'ai dans la foulée réservé la deuxième histoire écrite par les auteurs.

On découvre aussi un peu l'Histoire avec un épisode de massacre de nobles par leurs serviteurs (insurrection de Cracovie : les nobles de Galicie se font massacrer par des paysans à la solde de l’Autriche).

Le roman décrit aussi les différentes classes sociales, leurs activités "mondaines" : inauguration de théâtre, enterrement de personnalités. Le tout étant raconté dans une langue ironique, parfois sarcastique mais toujours à propos.



- Vous voulez plaisanter ! s'offusqua Zofia et, voyant que la situation se dégradait, elle décida d'en référer à la plus haute instance. Vous ne comprenez pas, mon mari est professeur. De médecine ! A l'université ! ajouta-t-elle immédiatement pour qu'on ne la prenne pas pour l'épouse d'un quelconque enseignant de lycée.
- Non, chère madame, c'est vous qui devez plaisanter. C'est moi qui dirige l'enquête et celle-ci concerne exclusivement l'assassinat brutal commis sur Mme Krzywda. Vous permettez que des questions comme celle de l'autopsie soient décidées par des spécialistes. Pardonnez-moi encore, mais la profession de votre mari n'a rien à voir ici. Jusqu'à ce jour, une seule femme a étudié dans notre université, et je pense que toutes les personnes présentes ici s'accorderont pour dire que c'est amplement suffisant. (page 119) 


Edité en 2015 lors de sa sortie, je trouve que le titre polonais résume mieux le roman (tajemnica domu helclów : le mystère de la maison Helcel).
Traduction française en 2022 par Marie Furman-Bouvard (merci à elle !)

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