Premier amour - Ivan TOURGUENIEV



Voldémar, le narrateur désormais âgé, se souvient de son premier amour rencontré l'année de ses 16 ans. En cet été 1833, il passait ses vacances avec ses parents dans la banlieue de Moscou et a fait la connaissance de leurs voisines désargentées mais nobles : la princesse Zassékine et Zinaïda, sa jolie fille de 21 ans. Cette dernière reçoit régulièrement ses admirateurs avec lesquels Voldémar doit se mesurer et semble avoir gagné une place préférentielle dans son coeur. Aussi, lorsqu'il découvre que celui qui obtient ses faveurs de femme à un homme, n'est autre que son père, Voldémar sombre dans une douloureuse mélancolie que même les promesses chaleureuses que lui témoigne Zinaïda ne pourront pas apaiser. Quelques mois plus tard, alors revenu en ville et ayant commencé son université, Voldémar croise l'un des admirateurs qui lui apprend que Zinaïda s'est rapidement mariée et est morte en mettant au monde un enfant.



Deuxième roman que je lis de l'auteur après "Clara Militch" (qui était aussi une histoire d'amour tué dans l'oeuf). Jolie prose entièrement dévouée à l'anatomie de la découverte du sentiment amoureux que vient perturber les affres de la jalousie.
...je n’étais qu’une cire molle entre ses doigts cruels.
L'auteur tel un juge implacable réserve un sort tragique aux deux amants maudits : le père succombe à une apoplexie (hémorragie cérébrale) et Zinaïda meurt en couches.

Sentiments timides, douce mélodie, franchise et bonté d’une âme qui s’éprend, joie languide des premiers attendrissements de l’amour, où êtes-vous ?

J'ai bien aimé la richesse des descriptions des sentiments
J’étais en proie à une singulière exaltation, comme si j’étais allé à un rendez-vous et avais passé, seul, devant le bonheur d’autrui…
mais je n'ai pas trouvé l'histoire en elle-même très intéressante. Pour cela il aurait fallu une fin plus percutante et "morale", si je puis dire ; par exemple que l'enfant soit adopté par la mère de Voldémar ou toute autre conclusion surprenante, honorable et positive.
J’errais comme une âme en peine, obsédé par un seul désir : celui d’en finir au plus vite. Une pensée me poursuivait pourtant : comment se faisait-il qu’elle, une jeune fille et de plus une princesse, eût été capable de se décider à cela, sachant que mon père n’était pas libre et que, d’un autre côté, Belovzorov s’offrait à l’épouser ? Sur quoi avait-elle compté ? Comment n’avait-elle pas craint de gâcher son avenir ?… C’est bien cela le véritable amour, la vraie passion, le dévouement sans bornes, me disais-je… Je me souvins d’une phrase de Louchine : «  Il est des femmes qui trouvent de la douceur dans le sacrifice…  ».


court roman publié en 1860
lu sur ma liseuse grâce à
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«  Qu’avez vous pensé de moi hier, m’sieur Voldémar ? me demanda-t-elle au bout de quelque temps. Je gage que vous m’avez sévèrement jugée.
–  Moi… princesse… je n’ai rien pensé du tout… comment pourrais-je me permettre de…, balbutiai-je tout désemparé.
–  Écoutez-moi bien, reprit-elle. Vous ne me connaissez pas encore. Je suis une lunatique. Vous avez seize ans, n’est ce pas ? Moi, j’en ai vingt et un… Je suis beaucoup plus vieille que vous ; par conséquent, vous devez toujours me dire la vérité… et m’obéir, ajouta-t-elle. Allons, regardez-moi bien en face… Pourquoi baissez-vous tout le temps les yeux ? » 

 

Illustration d'entrée de billet : William Quiller Orchardson "The Rivals" 

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