Extension du domaine de la lutte - Michel HOUELLEBECQ


Résumé 1
Un homme, désabusé, perd lentement pied dans la vie à l'approche des fêtes de fin d'année.

Résumé 2
A l'occasion de l'installation d'un nouveau logiciel en province, un homme comprend que sa vie est vide, n'a plus de goût à rien, et, pour couronner le tout, est entouré de personnages qui eux-mêmes ne sont pas des symboles de réussite (affectivement parlant).

Vous aussi, vous vous êtes intéressé au monde. C'était il y a longtemps. (p.13)

Mon avis
Billet dédié à mon ami DNM sans qui je ne serai plus là (à moins que ce ne fut le contraire). Et qui m'a fait connaître ce livre. Et qui aime ce livre, il me semble, au point d'aimer le relire. Tout comme un autre ami que nous nommerons R.

Dans ce roman :

  • Houellebecq nous prend à témoin :

Il se peut, sympathique ami lecteur, que vous soyez vous même une femme. Ne vous en faites pas, ce sont des choses qui arrivent. D'ailleurs ça ne modifie en rien ce que j'ai à vous dire. Je ratisse large. (p.15)
  • passe à la moulinette diverses choses :

Tout est sale, crasseux, mal entretenu, gâché par la présence permanente des voitures, le bruit, la pollution. Je ne sais pas qui est le maire, mais il suffit de dix minutes de marche dans les rues de la vieille ville pour s'apercevoir qu'il est complètement incompétent ou corrompu. (p.68, au sujet de Rouen)
La Vendée me rappelait de nombreux souvenirs de vacances (plutôt mauvais du reste, mais c'est toujours cela). (p.84, la Vendée)
Sous couvert de reconstitution du moi, les psychanalystes procèdent en réalité à une scandaleuse destruction de l'être humain. (p.103, la psychanalyse)
Officiellement, je suis en dépression. la formule me parait heureuse. Non que je me sente très bas : c'est plutôt le monde autour qui me parait haut. (p.135, la dépression)
Il fait rire, parfois sur des sujets dramatiques :
J'ai mangé une pizza, debout, seul dans un établissement désert - et qui méritait de le rester. (p.71)
Malgré l'avalanche d'humiliations qui constituaient l'ordinaire de sa vie, Brigitte Bardot espérait et attendait. A l'heure qu'il est elle continue probablement à espérer et à attendre. Une vipère se serait déjà suicidée, à sa place. Les hommes ne doutent de rien. (p.91)
Avant de poursuivre, je reviens à R. qui m'a dit que ce livre était un "livre pour hommes", il veut dire par là qu'on y parle de sexe, et plus précisément de masturbation, et autres pensées intimes que doivent avoir les hommes, comme celles de se demander à quoi pensent les femmes, surtout si elles sont laides et ont l'air de se chercher un mec (les pauvres). Je n'aime pas les catégories. Je dirai que ce livre est un peu "cru" mais la seule chose qui m'ait déplu, c'est plutôt l'épisode où le personnage principal incite son collègue à commettre un meurtre. Là, j'ai trouvé cela franchement vulgaire et artificiel.

Extension du domaine de la lutte, c'est l'idée du libéralisme. Un jour, on veut se défaire de nos chaînes, et alors on part à la dérive, luttant contre les évènements qui viennent nous percuter, luttant surtout contre nous même.

Sinon, ce livre est tout à fait plaisant à lire et pour moi, c'est une sorte d'anthologie du vécu de certains prestataires en informatique, moi qui suit du "métier", j'ai trouvé le trait du tableau très ressemblant.

Houellebecq est un auteur qui me convient : pour ce que j'en sais de lui. Je dirai qu'il pratique l'autodérision avec un humour qui me sied.
Depuis des années je marche aux côtés d'un fantôme qui me ressemble, et qui vit dans un paradis théorique, en relation étroite avec le monde ; j'ai longtemps cru qu'il m'appartenait de le rejoindre. C'est fini.

Commentaires